Taxation des multinationales : la Belgique et les autres Etats membres doivent passer outre le véto hongrois

 (Crédit : © CNCD-11.11.11
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Bruxelles, le 6 décembre. L’adoption d’un taux d’impôt des multinationales de 15 % a été retirée de l’ordre du jour de la rencontre des ministres des Finances des 27 (ECOFIN). Alors que le sujet est sur la table depuis près d’un an, l’Union européenne ne parvient pas à adopter la directive de mise en œuvre de l’accord conclu à l’OCDE en octobre 2021, du fait du blocage par la seule Hongrie. Pour le CNCD-11.11.11, la Belgique et les autres Etats membres doivent prendre leurs responsabilités et avancer entre eux, quitte à compenser le dumping fiscal hongrois, comme le permet l’accord.

La directive européenne proposée est un premier pas pour mettre en œuvre l’accord signé le 8 octobre 2021 par l’OCDE et le G20. Pour rappel, cet accord repose sur deux piliers : (i) la taxation unitaire d’une partie des profits résiduels d’une centaine de grosses firmes multinationales et (ii) l’instauration d’un taux minimum mondial d’impôt des entreprises multinationales dans le secteur numérique.

« 76% de la population belge souhaite un impôt minimum mondial sur les bénéfices des multinationales (selon le Baromètre 2022 de la solidarité internationale réalisé par IPSOS). Par ailleurs, cet accord de l’OCDE, bien qu’imparfait, est un pas dans le sens de la justice fiscale internationale » précise Arnaud Zacharie, Secrétaire général du CNCD-11.11.11.

La Hongrie bloque depuis plusieurs mois l’adoption de la directive de mise en œuvre du taux minimum d’imposition des multinationales au sein de l’Union européenne. Le texte doit en effet être adopté à l’unanimité par les vingt-sept États membres, ce qui donne de facto un droit de veto aux Etats membres.

Pour sortir de cette impasse, l’UE pourrait avoir recours au mécanisme de la coopération renforcée entre un nombre plus restreint de pays (minimum 9). Début septembre, les ministres des Finances de cinq d’entre eux (l’Allemagne, l’Espagne, la France, l’Italie et les Pays-Bas) ont réitéré leur engagement à mettre rapidement en œuvre le taux d’imposition minimal des multinationales afin que les entreprises payent « leur juste part du fardeau pour atténuer l’impact de la crise énergétique mondiale ». Le ministre belge des Finances Vincent Van Peteghem a par ailleurs déclaré, dans sa Note de politique générale 2023, que « si l’accord pilier 2 ne peut être transposé à l’unanimité au sein de l’Union européenne, la Belgique prendra l’initiative de parvenir à un accord bénéficiant d’un large soutien au sein de l’Union européenne » (p.31).

Pour le CNCD-11.11.11, le chantage du gouvernement hongrois est inacceptable. Les Etats membres doivent donc passer outre et mettre en place une coopération renforcée à 26, en utilisant les mécanismes prévus par l’accord : si un pays persiste à soumettre les bénéfices des multinationales à un impôt inférieur à 15%, il est loisible à tous les autres de prélever les taxes manquantes au détriment du pays concerné. La Belgique doit donc plaider pour une activation rapide de ce mécanisme, qui permettra de contourner le véto abusif d’un seul Etat membre, obstacle à la justice fiscale internationale.